lundi 30 janvier 2012

MON CHEMIN (Dessin à l'encre, 16,5x10,5 cm, 2005 - Collection particulière)


MON  CHEMIN

Parcourant les pistes qu’offrait l’enfance,
J’écoutais le vent qui volait le temps,
Le prenant, le pressant, le mettant en souffrance.
 Comm’ lui, j’avais l’âge de déraison battant
Tout’ les campagnes d’un présent trop vaste
Et trop plein où rien d’autre n’importait
Que la joie et les jeux, les rires, les goûters,…
Rien ne me paraissait vraiment noir ni néfaste
Hormis les hauts murs de cette prison
Que l’on appelait déjà la Raison
Et les rets de cette réalité trop triste,
Dont les arrêts, par trop, s’la jouaient rigoristes…

En attendant de franchir le perron,
Je fais le luron et le fanfaron :
Je vis une vie ennuyeuse,
Que je rendrais soyeuse et mieux joyeuse !
En attendant de franchir le perron,
Je dévore, seul, le Décaméron…

Au passage des jours de ma jeunesse,
Moi, j’étais le vent et j’avais le temps.
Je me moquais du bien, des biens, du droit d’aînesse,
Des principes et des conventions tout autant…
Je me rêvais et puis, comme cheval se cabre,
Battais les bois aux buissons tout bruissants
Farfouillant le fouillis des taillis. Tout-puissants,
Mes désirs, mon plaisir m’étaient haches et sabre
Et me taillaient des sentiers bien grossiers
Que tout seul, j’arpentais, en initié ;
Ils m’ouvraient une voie par d’insolentes sentes
Que je croyais - que je voulais ! - plus qu’indécentes…

En attendant d’entrer dans le giron
D’un train-train quotidien qui vous corrompt,
Je vis une vie merveilleuse
Que rien, jamais ne peut mettre en veilleuse.
En attendant d’entrer dans le giron
D’habitudes qui m’feront percheron…

Ensuit’, par les allées de mon bel âge,
J’ai couru après le vent fou car mon temps
Se perdait trop loin des rumeurs et des tapages,
En archipels ou bien en chapelets d’instants…
J’allais sans allant, en marchant, au pire,
Sur un chemin droit, pavé de devoirs,
Plus rarement d’espoirs, de rêves, de pouvoirs
Mais, bien entendu, car tout cela va sans dire,
De vouloirs, jamais. Mais je progressais
Bridé et, pis, mis au pas cadencé
Par ceux qui règnent et tirent leur certitude
De nos faiblesses, nos peurs et nos inquiétudes…

En attendant d’avoir un peu plus d’ronds,
Je reste un sous-fifre, humble tâcheron,
Je vis une vie ennuyeuse,
Enchaînée, morne, travailleuse…
En attendant d’avoir un peu plus d’ronds,
Ma vie fait ronron, elle tourne en rond…

Sur le sombre chemin de la vieillesse,
Le vent toujours me précède, le temps
Me poursuit sans aucun remords ni gentillesse ;
Il me pousse devant souvent en s’irritant
De ma lenteur. C’est bien vrai que je traîne,
Je me rappelle, tout en avançant
Sous le couvert grinçant, d’arbres noirs, agaçants,
Comme ces souvenirs que, tant de fois, j’égrène
Tout seul, quand, comme d’hab’, je viens et je vais,
Las d’aller mon train quand, vous, vous vivez…
Mais, chaqu’ jour qui passe, effeuille la moire
D’ceux que n’a pas élagués ma mémoire !

En attendant de tenir l’aviron
De la barque chargée du vieux Charon,
Je vis une vie en veilleuse
Que, d’aucuns, pensent merveilleuse…
En attendant de tenir l’aviron,
De vivre l’instant où tout s’interrompt.

samedi 28 janvier 2012

LA REQUÊTE (Acrylique sur toile, 41x33 cm, 2006)


LA   REQUÊTE

Y a-t-il, quelque part, un Dieu pour essuyer
Les larmes de celles qui n’ont pu être mères ?
Qui m’offrira une épaule pour m’appuyer
De toute la douleur de mon âme ébranlée ?
Qui donc apaisera cette souffrance amère
Qui me déchire le ventre, comme empalé ?
Qui, désormais, viendra ? Qui me restera proche
En m’épargnant griefs, compassion et reproches ?

Une faute, un péché ou bien mon cœur de roche,
Voilà tout ce que je suis en train de “payer” !
Car, à seize ans, aimer c’est être dévoyée…
Mais mon amour enfui vaut le tien, Tournebroche !

Dans cet hôpital, mon “crime” sera complet.
Sans main amie pour m’aider à panser ma plaie,
Pour distraire ces regards hostiles, appuyés :
Je vais rendre une vie qui éclôt éphémère…
Y a-t-il, quelque part, un Dieu pour essuyer,
Les larmes de celles qui n’ont su être mère ?

jeudi 26 janvier 2012

INTIMITÉ VOLÉE (Pastel à l'huile, 24x32 cm, 2005)


INTIMITÉ   VOLÉE

Sous le soleil qui soûle et le ciel qui s’écroule
Des couples renaissent pleins de délicatesse
Alors que la houle afflue puis reflue et roule 
Intimité volée à la promiscuité
Des bustes de déesses ou bien de brutes épaisses 
Dans l’uniformité et dans la vacuité

mardi 24 janvier 2012

DIALOGUES EN APARTÉ (Acrylique sur bois, 16,5x10,5 cm, 2002)

DIALOGUE   EN   APARTÉS

« Il parait, c’est paru hier, qu’à Paris…
- On parie ? Sûrement pas !…
- De toute façon dans les parages de cette paroisse, comme partout d’ailleurs, personne n’a plus le sens du partage. Parole !
- Non, c’est pas drôle, parbleu !… 
- À Paris, disais-je, apparu, rue du Paradis ou du Parc, un para’ en parka qui vivait à part et pouvait paraître sans pareil ni parent.
- Un par an ?… C’est pas rien !… T’es sûr qu’il était pas russe, par cas ?!… Il faut parfois considérer ce paramètre !
- Et bien non : c’était un parrain de Parme ?
-  Un rein de dame ?!… C’est pas vrai ?!… Les Bleus et le parquet vont bouger et lui en mettre un paquet, non ?!
-  Peut-être !… En tout cas ce n’était pas un paria sans appart’ vivant sur un parvis ou un parking. Tu parles qu’il était sans doute, bien que je ne voudrais pas être partial, paré du poulailler jusqu’au parterre, ce parti !
- Il est parti ? Mais par où ?! …
- Sûrement en parade, par-ci par-là, sur quelque parcours qu’il savait par cœur. Ce parjure était de la partie - Pascals, parures et compagnie - et s’il n’était pas roi, ce parvenu vivait presque comme !…
-  Sur une paroi de fresque ?… Quel drame !… Il n’était pas rond ? 
-  Pas un rond, pardi, mais des centaines, des millions,… !
- Pardon de te contredire mais pour les biftons, y’a jamais personne… Enfin pour les laisser parce que pour les prendre… Ça, à Paris !
- Oui, c’était à Paris !
- Moi non plus, j’ai même pas ri !… Comme ça c’est parfait !
- Enfin, à part ça, te voilà au parfum !
- C’est bon de parler !… Pour ça : je suis toujours partant ! »

dimanche 22 janvier 2012

AU PIED DU MUR (Pastel à l'huile, 29x21 cm, 2005)

AU  PIED  DU  MUR

Prendre les devants pour assurer ses arrières
À les entendre les bras m’en tombent des mains
Pourquoi donc moi qui n’ai pas l’âme aventurière
Dois-je sur cette paroi faire mon chemin
Savoir que Marat fut le premier de Corday
Ne pousse pas à plus de confiance accorder
Au lieu de me suspendre elle pourrait me pendre
Cette corde et ils veulent me voir me détendre
Si je me casse les dents j’m’en mordrai les doigts
À leur harnais je préfère  le Suédois
La Beauharnais Pythagore et mêm’ le poudingue
Monter à leur façade on devrait interdire
Ils ont un pet au casque je vais le leur dire
Mais j’ai peur car contrarier les fous les rend dingues
Si c’est vrai qu’au pied du mur on voit le maçon
Au bas de ce truc moi j’ai fait dans mon cal’çon

vendredi 20 janvier 2012

FLEUR DE BITUME (Acrylique sur bois & Collages, 30x27 cm, 2011)


FLEUR  DE  BITUME

Au vieux soir d’un printemps nouveau,
Dans le lit creux d’un caniveau,
Où cœur, yeux, âme se cloisonnent,
Une fleur, là, détonne, étonne.
Venue seule, d’on ne sait où,
Elle a donc fleuri malgré tout.
Aujourd’hui, elle s’abandonne,
À mon regard perdu se donne ;
Elle semble offerte au présentoir
Du polochon froid d’un trottoir.
Déboutonnant ce qu’on goudronne
Et décousant ce qu’on bétonne,
Elle casse ce qui est construit
Comme ça, sans cris et sans bruit…

Le temps se tait et se défile :
La nuit s’est couchée sur la ville
Qui, pas tout à fait endormie,
N'est plus tout à fait éveillée.
Elle rêve, dans cette accalmie,
D’horizons désembouteillés,
Sur un oreiller de bitume,
Sous des draps d’ombre et d’amertume.

On est loin du noir de caveau,
La pénombre est en écheveau,
Sous les néons qui tourbillonnent
Aux rues qui ronchonnent, ronronnent.
Si les lumières sont partout,
Cette fleur garde éclat sur tout ;
Rien, ici ne la désarçonne
Et personne ne l’impressionne.
Entre poubelle et dépotoir,
La simplicité en sautoir,
Dans le soir qui nuit et charbonne,
Elle rayonne, elle crayonne,
De feuilles d’or et d’ambres fruits,
L’asphalte bleui de la nuit.

Le temps s’affaire et il défile.
La nuit vient de quitter la ville ;
 Elle n’est plus vraiment endormie
Et pas tout à fait réveillée.
On s’habille l’anatomie,
On babille pour s’abeiller.
La rue bourdonne en gris costume,
Bougonne comme de coutume.

Les gaz mettent l’air au cuveau
Les sens, les nerfs en godiveau.
Le vent venu qu’on empoisonne,
Que les grands boulevards emprisonnent
Souffle, sue, s’insinue partout ;
Il a éteint la fleur, itou.
Sous les nuages qui grisonnent,
Où des fumées de mort moutonnent,
Un clocher sert de noir butoir ;
Son bourdon, du Ciel fier heurtoir,
Annonce sa mort et résonne
Sur un monde que rien n’ordonne :
La vie passe, bref usufruit,
Qui, trop vite, déjà s’enfuit…

mercredi 18 janvier 2012

LA BELLE BAIGNEUSE (Dessin à l'encre, 16,5x10,5 cm, 2005)


LA  BELLE  BAIGNEUSE

Une peau de bébé, par le soleil hâlée,
Avec un corps sculpté, par l’effort modelé,
Tu es de celles que tous les regards convoitent
Fière et droite, face à l’océan qui miroite.

lundi 16 janvier 2012

OUVERTURE DE BOÎTE (Construction, 38x26x33 cm, 2010)

OUVERTURE  DE  BOÎTE

Fumée. Laser. Chaleur. Murs mouvants et couleurs
Qui nappent la chape, dérapent ou nous drapent.
Tous en grappe, satrape ou gouape qui sape,
Sur un boucan hurleur, dans des bruits marteleurs
Qui décapent les ouïes. Oui, ce soir, on s’échappe :
Fumée, laser, chaleur, murs mouvants et couleurs,…

Un rythme qui tape et un rayon chausse-trappe,
On oublie la pâleur, les malheurs, les douleurs.
Le corps en pleurs, le cœur à fleur, l’esprit hâbleur
Quand le feeling nous frappe, le son vous décape
Les racoleurs ou les jongleurs, les cavaleurs.
Un rythme qui tape et un rayon chausse-trappe.

Sur ces sons saouleurs et siffleurs, l’heure est à l’heur,
À l’espoir d’agapes pour bambins et Priapes,
Entre les hauts parleurs et autres beaux-parleurs,
Buveurs de hanaps ou papes de la retape
Sur ces sons saouleurs et siffleurs, l’heure est à l’heur.

Le D.J., en cape, jappe. Les lampes happent
À mâle heure, voleurs, avaleurs de valeurs,
 Râleurs qui, là, rapent, ronfleurs las qui s’escapent,
Rouleurs, ivres des sens, enjôleurs et gifleurs,…
Le D.J., en cape, jappe… Les lampes happent…

samedi 14 janvier 2012

RIVALE DU CARNAVAL (Triptyque, Acrylique sur bois, 3x(46x38 cm), 2000)

RIVALE  DU  CARNAVAL

La foule des masques roule et louvoie dans l’ombre
 Grise de la place prise entre chien et loups.
Brume de plumes, dominos aux reflets flous,
La cavalcade se noie dans une nuit sombre.

Mais la brune n’engloutit pas l’éclat du nombre
Dans la rue  étroite où vibrent soie et pilou.
La mascarade tourne au charivari fou
Avant que ne  l’inonde une onde de pénombre.

Le crépuscule n’estompe pas ce trottoir
Où la fête s’offre en cris, en coup de boutoir,
Et, vergogne en sautoir,  part quêter découvertes.

De fièvre furieuse en folle fougue, l’air bruit
Sans entrevoir, sous le fardeau de son ennui,
L’écueil esseulé d’une fille en robe verte.