dimanche 30 septembre 2012

PLUIE EN PLAINE (Acrylique sur bois, 22x15 cm, 2000)

PLUIE  EN  PLAINE 

Quand la pluie que j’épie picote en paix les plaines
Elle picore aussi et mes plaies et mes peines
Ses replis dans leurs plis d’un picot accompli
Quand elle pique sans réplique mon dépit
Et plie les épis qui sans répit la supplient
Alors qu’expire la toupie des utopies
Elle me multiplie et les plaies et les peines
Quand la pluie piquette les piquets sur les plaines

vendredi 28 septembre 2012

IKEBANA (Acrylique sur toile & collages, 96x81 cm, 2010)


IKEBANA
Graviers ratissés nets comme une table.
Magnolia étoilé au port princier.
Une cour murée où trônent érables,
Cèdres élancés et vieux cognassiers,…
Tout de spires simples ou suppliciées
Honshu s’offre en images d’Épinal
Et petits cailloux d’un blanc virginal.
Bonsaï torturé, bonzes tonsurés
Et la grâce d’une grue qui s’envole
Dans les stries des vents d’un ciel azuré.
Au midi d'un temple shinto qu'isolent
Cerisiers et pommiers en fleur, frivoles,
Honshu s’offre en images d’Épinal,
Onsen, saké et drapeau national.
Une maison fragile au toit gracile,
bois, bambou teinté et papier de riz.
Tatami et futon, la vie facile.
Sushis colorés, tofu difficile,
Paravents, estampes et noirs écrits,
Honshu s’offre en images d’Épinal
Dans un éblouissement matinal. 
Le Mont Fuji enneigé au lointain.
Cerf-volant aux calligraphies savantes,
Ombrelle et kimono, des filles au teint
De porcelaine jouent les suivantes,
De complexes origamis inventent.
Honshu s’offre en images d’Épinal
Loin de Tokyô au rythme infernal.
Genévrier, corète et chrysanthème.
Un dojo. Une pagode endormie
À l’ombre des geishas aux fards trop blêmes,
Des sumotoris aux si lourds emblêmes,
Du mikado,  des shoguns ennemis.
Honshu s’offre en images d’Épinal,
Japon doré désormais marginal.
Calame en main, il compose un haïku
Pour une mousmé aux yeux en amande,
Lui, le samouraï qui aime beaucoup
Drame  et senryûs en guirlandes,
Roses bleues, ikebana de commande,…
Honshu s’offre en images d’Épinal,
Zen et jusqu’au tsunami final…

mercredi 26 septembre 2012

BROUILLARD SUR LES CRÊTES (Acrylique sur bois, 21x17 cm, 2000)


BROUILLARD  SUR  LES  CRÊTES
Cycle pyrénéen
  Pudique comme une vierge biblique, la brume embrouillée jette un voile mouillé et vaporeux sur une gorge nue offerte aux nues. Elle cache dans un coton uni et nébuleux un vallon profond et ses frondaisons fleurant les fruits de saison ; elle couvre d’un drap fluide et humide des ballons aux rondeurs provocantes et y perle doucement ses pleurs en rosée d’aurore.
  Dans la moiteur de la brume embuée de nuages, le relief semble dévoré par une onde blafarde qui esquisse et gomme ses courbes, estompe et aquarelle ses couleurs. Accrochée, elle écrête les sommets mamelonnés et transpire un ciel de sueur fraîche et pénétrante. Attachée, elle étête les crêtes discrètes et coiffe les pics effilés d’une chevelure filasse qu’emmêle le vent qui s’y mêle. Elle encapuchonne les monts d’écume immaculée et mouvante où se claquemurent les murmures et les fadaises d’un soleil affadi.

lundi 24 septembre 2012

SCÈNES QUOTIDIENNES (Construction, 31x22x24,5 cm, 2008)

SCÈNES  QUOTIDIENNES

Derrière les façades prospères
Sereines et apprêtées
Entre voisins on se réprimande
Dans ce quartier si pépère
Il bougonne à la demande
L’bourgeois coupé des réalités

À chaque nouveau palier
On se hérisse on prend la mouche 
Chez tous les domiciliés
Ça crie ça peste ça escarmouche
Contre le temps et le chat
On chicane on se lâche on se fâche
On hurle on prêchi-prêcha
On s’échauffe on éclate on se clashe

Sans la moindre sympathie
On engueule qui se hérissonne 
Gourmande avec appétit
Sans jamais se soucier de personne
On cherche les plus petits 
Des poux entre époux sonnant des cloches
Conspuant et s’irritant
Dès qu’on n’en fait pas à sa caboche
On râle en se disputant
Avec sa femme lui chantant pouilles
Et l’enfant en fait les frais
Qui passe un savon au chien  fripouille
Au grand cœur qui s’en effraie

Derrière les façades prospères
Sereines et apprêtées
Il moralise agonit fustige
Dans ce quartier si pépère
Pour le moindre des litiges
L’bourgeois coupé des réalités

Sans vergogne ni façon
On s’encolère et on se querelle
Pour un retard un soupçon
On se chamaille on paille-poutrelle
Pour un regard un suçon
On se tance on maugrée aux fenêtres
Et aux portes l’on gémit
On grommelle avant de disparaître
Ou bien l’on blâme à demi
On pleure on geint on crosse on rouspète
Car de serments en sermons
Il faut que ça sorte tonne et pète
Que ça gueule à pleins poumons

Ici on gronde on bronche on ronchonne
On grogne on chipote là
Tempêtant quand l’escalier bouchonne
On risque le pugilat
Quand d’aventure on chapitre un gosse
Pour une oreille tirée
La semonce peut devenir grosse
L’apostrophe déchirer

Derrière la façade prospère
Sereine et bien apprêtée
On joue les censeurs on morigène
Dans ce quartier si pépère
Il proteste sans qu’ça gêne
L’bourgeois coupé des réalités

samedi 22 septembre 2012

LES LUMIÈRES DE LA VILLE (Acrylique sur toile, 110x92 cm, 2008)


LES  LUMIÈRES  DE  LA  VILLE

J’ai fait ce rêve abracadabrantesque
Mais demain, sûr, je partirai là-bas,
Pour cette capitale gigantesque…
Qu’ai-je donc à espérer ici-bas
Hormis la misère qui vous abat ?
Je ne serai qu’un cul-terreux grotesque
Comme mes pères, qu’on dit “pittoresques” ;
Non, je ne veux pas vivre au bois dormant
Ni, à vingt ans, paraître un vieux de fresque.
Je vous dis que je veux vivre autrement !

Comme on part pour les terres barbaresques,
Sans débat ni combat, sans branle-bas,
Je fuis une besogne titanesque
Pour une caverne d’Ali Baba
Pour vivre en pacha, sans coup de tabac.
Je quitte un monde aux traditions livresques,
Condamné aux habitudes, ou presque,
Aux coutumes et à l’abaissement,
Pour des joies, des rires, des arabesques,…
Je vous dis que je veux vivre autrement !

Certains, avec des grimaces simiesques,
M’ont bien promis labeur, pleurs et coups bas
Et, bien pire, un avenir picaresque
Car un gueux ça garde toujours son bât ;:
« Sache que celui qui trop rêve en rabat
Ici, là-bas ou sous les cieux mauresques ! »
Fustigeant mes fantasmes romanesques
Tous les envieux m’ont dit, sans fondement,
Que l’usine, c’est un enfer dantesque…
Je vous dis que je veux vivre autrement !

Je laisse là tous ces bouseux burlesques
À leur peur de l’inconnu, des Tudesques,
À leur train-train vieillot, sans agrément,
À leurs mille maximes prud’hommesques
Car moi, je vous dis que je veux vivre autrement !

jeudi 20 septembre 2012

INTERROGATIONS (Acrylique sur papier, 21x15 cm, 2007)

INTERROGATIONS

Qu’y a-t-il ?
Que se passe-t-il ?
Je m’inquiète…
Comme une mauviette
Aux abois ;
Je reste sans voix.
La nuit quiète
En bruits sourds s’émiette…
Qu’y a-t-il ?
Que se passe-t-il ?

mardi 18 septembre 2012

SANG PERSAN (Acrylique & collages sur toile, 96x81,5 cm, 2010)


SANG  PERSAN

À l’âge des poupées à deux roupies,
Au temps du toupet, au temps des toupies,
Shéhérazade, sans fanfaronnade
Petite fille modèle un peu fade,
Faisait ses nuits, sous le ciel assoupi
D’un de ces pays de l’Orient impie.
La belle enfant rieuse, astucieuse,
De nature curieuse et insoucieuse,
Qui parcourait vélins et parchemins,
Quand d’autres couraient moulins et chemins,
Ne fut jamais précieuse capricieuse,
Toujours pieuse, restant silencieuse.
Au temps dissipé qui fait les chipies,
Elle s’est échappée de ses utopies,
Shéhérazade, non pour des passades
Pour un satrape blasé en mal d’aubade
Passant ses nuits, sous un ciel rechampi,
Couleur d’ennui, à conter sans répit.
Conteuse laborieuse, judicieuse,
Voix mélodieuse et allure gracieuse,
En charmant le malin resté gamin
Du jour en déclin jusqu’au lendemain,
Elle l’arracha à sa folie furieuse,
Audacieuse, pas pour autant glorieuse.
Le vent a dissipé ce temps où tapis
Et canapés écoutaient, sans répit,
Shéhérazade, qu’un vieux roi maussade
Épousa, sans calcul et sans toquade,
Pour son bel esprit, lui, le Décrépi,
Sans autre prix, pour le bon et le pis.

dimanche 16 septembre 2012

SURFER, C'EST SURFAIT ! (Pastel à l'huile, 21x15 cm, 2005)


SURFER,  C’EST  SURFAIT  !

  Leur planche de salut pour la pêche à la morue, celle qui n’a rien dans le chou et encore moins de dessous, ils l’ont en main. Avec ce faix, ce bienfait parfait, ce sésame qui fait de l’effet, l’affaire est dans le sac… et le ressac. De toute façon, c’est un fait, les vagues sont toujours “trop” et les rouleaux jamais “assez”, alors, ils restent sur la plage pour commettre leurs méfaits.
  C’est donc l’errance au cœur des apparences pour ces coqs sans clocher, attifés comme des paons, branchés et brushés, encore à l’âge d’être mouchés. Ils font la grève pour traquer leurs proies à l’étal, loucher sans se faire doucher, bêcher les thons et dire leur fait aux planches à pain. C’est du surf, le gros du turf dans ce rucher pour riches débauchés, ce bûcher pour biches débâchées.
   Ainsi ces fauchés, aussi aisément défaits que refaits, doivent paraître pour être, nicher et plancher pour chevaucher… et s’empanacher de ce forfait !

vendredi 14 septembre 2012

THE BROWN CLOWN (Acrylique sur toile, 41x33 cm, 2006)


THE  BROWN  CLOWN

Tapi dans l’ombre du rideau,
Il songe à sa vie de ratages.
Un brin penaud. Un peu lourdaud.
Puis vient l’heure du maquillage
Pour compléter son habillage.
Son reflet le miroir effleure,
Pourtant, idiot de bas étage,
Le clown est triste, le clown pleure.

À la piste tournant le dos, 
Il entre, sourires en sillage.
Il croit oublier son fardeau,
Sous des lumières en balayage,
Ses soucis dessous son grimage.
Mais obligé de la male heure,
Au fond de son cœur au mouillage,
Le clown est triste, le clown pleure.

Il s’offre en cadeau aux badauds,
Et reçoit, aux bravos sans âge,
Plein de claques, force seaux d’eau.
Il fait rire d’un babillage,
Crier à ses enfantillages,
À ses grimaces et à ses leurres.
Mais dans ses yeux flotte un nuage ;
Le clown est triste, le clown pleure.

Ami, à ce remue-ménage
Toi qui t’es esclaffé sur l’heure,
Sais-tu combien le clown est triste, le clown pleure  ?