samedi 30 avril 2011

MATER DOLOROSA (Acrylique sur papier, 21x 15 cm, 2007)

MATER  DOLOROSA

J’ai une fille, quelque part,
Qu’a connu un nouveau départ.
À peine arrachée à mon ventre
On me l’a prise, dans « le Centre ».
Je l’ai pas vue, sans m’émouvoir,
Encore moins la prénommer, diantre !
Je n’ai même pas voulu la voir.
Je n’étais pas prête à être mère.
Trop jeune. Pas fière. Amère.
Couches, biberons, rots, bavoirs,…
À seize ans, on en énumère !

Oui, une fille de huit ans
Et je pense à elle tout le temps.
Est-elle aimée ? Est-elle heureuse
Sans moi, loin de moi, la peureuse
Qui lui ai donné cette vie,
À ce petit bout, cette pleureuse,
Sans en avoir la moindre envie ?
Qui est sa “maman”, cette mère
Que je fus, une heure, éphémère ?…
En moi encore elle survit,
Comment est-ce qu’on se rémère ?

J’ai une fille, quelque part,
Que je n’oublie pas pour ma part.
Les regrets, les remords me rongent.
Fut-elle bercée de vrais mensonges ?
Oui, souvent je voudrais la voir.
Chaque fois que je plonge, je songe
À savoir, lui faire savoir
Que je pourrais être enfin mère.
Mais c’est là cruelle chimère…
Voudra-t-elle me voir ? Savoir ?…
Chez moi, les douleurs s’énumèrent…

jeudi 28 avril 2011

MASQUE FANTASQUE (Acrylique sur papier, 21x15 cm, 2006)


MASQUE  FANTASQUE

Roi du pays de la Torne
Que les vents et le ciel bornent,
Il a l'œil et la voix mornes
Et son front s'orne de cornes.

Qu’on le flagorne ou l'écorne
Et aussitôt il encorne,
Hurlant comme un vieux dieu corne
En frappant sur son bigorne !

mardi 26 avril 2011

ÉDEN RETROUVÉ (Acrylique sur bois, 41x45, 2006)

ÉDEN  RETROUVÉ

Quand j’ai l’âme et le cœur endeuillés,
Oui, je me rêve œillet effeuillé
Et veux refaire le Grand Voyage,
Revenir au ventre de la mer,
Recommencer, comme au début des âges,
Dans l’eau âcre, dans le sel amer.
Loin des foules. Loin du tapage…

Sans craindre les foudres du Ciel,
Ramper jusqu’aux cendres de la Terre
Fuir l’accessoire et l’artificiel
Qui défleurit monts, vaux et parterres.
Une vie tout en frugalité,
En liberté, en fraternité.
Redevenir seul. Et terre-à-terre…

dimanche 24 avril 2011

VACHERIE, LA MACHINE RIT ! (Acrylique sur bois & collages, 28x30,5x6,5 cm, 2011)


VACHERIE,  LA  MACHINE  RIT  !

La vie ! Drôle d’engin, vraiment ?…
Cette machine est sûrement,
Tendrement ou méchantement,
Le dur rouage d’événements,
Enchaînant tourbillonnements,
Rires et tiraillements,
De naissances en testaments.
Tranquillement. Tragiquement.
Tournent, lentement, vainement,
Tristement mais résolument,
Ses roues rouées : peines, tourments,
Soucis, peurs et pleurs d’un moment,…
Usinant, usant, simplement,
Sèchement et sévèrement,
Jusqu’au joint,  joies, amusement,
Fraisant plaisir, soulagements,…

Des roues dentées - Pourquoi ? Comment ? -
Ses courroies de cuir, sottement,
Amènent crûment, rondement, 
Ronronnement, roucoulements,
- « Mécanique des sentiments ! » -
 Puis rudiments du rudoiement ;
Mettent en  pièces, savamment.
Tiédeur. Froideur. Rugissements.
Automatisme ou grincements,
Les ressorts du ressentiment
Masques et travestissements,
Conduisent aux écrous sûrement,
Aux errements, aux serrements,
Bien qu’on ait fait mille serments
En supplément. Sincèrement.
Solidement… Stérilement. 

La vie est bielles pour qui ment,
Simple assemblage seulement,
- Pignons et tout le tremblement -
Balanciers et balancements.
Pour les autres, si sottement
Programmés pour aimer gaiement,
Reste l’essieu pour pleurer, M’man.
Ruissellement… Débordements…
Laminés triomphalement,
Leur compteur, moteur et aimants
Tourne jusqu’au tarissement.
Reniements et renoncement.
Revirements. Retournements.
Ressassements. Ressentiments.
Sournoisement et sourdement.
La vie ? Drôle d’engin, vraiment !

vendredi 22 avril 2011

QUAND S'ENDORT LA BANLIEUE (Acrylique sur toile, 41x33 cm, 2006)


QUAND  S'ENDORT  LA  BANLIEUE

D’un trait de lune, ô miel du ciel, telle une plume
Ambre et brune aux reflets de fiel, la nuit allume
Et ilune d’ombres déliées les volumes,
Barres, tours et arbres qu'Éole, un peu, déplume…

Béton et bitume sont de nos vies la glume,
La pénombre encombrée, de cent peurs se remplume,
Jusqu'à ce qu'obrombrée, l'aurore se rallume
Sur l'asphalte bleuie faite mortelle enclume.

mercredi 20 avril 2011

UNE NUIT D'ENNUI (Acrylique sur toile, 41x33 cm, 2006)

UNE  NUIT  D’ENNUI

      Esclave des méandres mouvants de souvenances ressassés, captif des chicanes capricieuses des regrets ruminés, je perds mes saisons sans raison et déroute mes chemins dans des cul-de-sac en vrac. Coincé dans l’impasse lasse d’une vie vide, je parcours désormais les boulevards bouleversés, les voies dévoyées, les avenues nulles et non-avenues, les rues désertées, les venelles assombries de ce temps où, sans trêve, tout m’apparaissait l’antichambre de rêves pleins d’espoirs qui cheminaient de ruelle en ruelle,… Bref, un itinéraire incertain et téméraire, un labyrinthe qui, aujourd’hui, m’éreinte de remords.
   Prise dans le lacis lascif de ces voies intérieures, désormais sans issue, ma tête bouillonnait de mille projets dérangés, mon cœur pour une pulsion brûlait d’autant de passions. La lucidité n’avait pas su les émousser, le dédale du quotidien n’avait pu les élimer, les déconvenues pas voulu les user,… Il ne me reste plus que leur contour corrodé faiblement esquissé, l’ombre minée de nombre de ces voies antérieures à peine éclairées par le réverbère falot de mes souvenirs de ballot.

lundi 18 avril 2011

NO MAN'S LAND (Acrylique sur toile, 41x33 cm, 2006 - Collection particulière)


NO   MAN’S   LAND

Aux rives futiles de nos grandes villes,
On bâtit, subito, pour les Esperantos,
Là où gîtaient pile taudis et bidonvilles,
Des trucs monumentaux, des quartiers faits ghettos.

On bâtit, subito, pour les Esperantos,
Sur un pré peu tranquille au bitume stérile,
Des trucs monumentaux, des quartiers faits ghettos,
Des clapiers volubiles dans du béton fébrile.

Sur un pré peu tranquille au bitume stérile,
On laisse, à des costauds qui jouent trop du couteau,
Des clapiers volubiles dans du béton fébrile,
Les hurlements brutaux, les incendies d’autos,…

On laisse à des costauds qui jouent trop du couteau
- Insolence infantile, violence inutile -
Les hurlements brutaux, les incendies d’autos
Qui écorchent la nuit, le silence mutilent.

Insolence infantile, violence inutile,
Les gosses, incognito, et les courtauds marteaux,
Qui écorchent la nuit, le silence mutilent,
Se rêvent Méphisto, loin de nos lamentos.

Les gosses, incognito, et les courtauds marteaux,
 À peine nubiles ne se font pas de bile,
Se rêvent Méphisto, loin de nos lamentos,
Et même jubilent que l’on reste immobile…

 À peine nubiles ne se font pas de bile
Ces rustauds de banlieue qui la jouent “aristo”
Et même jubilent que l’on reste immobile :
Ils en font des quintaux… mais la rue c’est l’étau !

Ces rustauds de banlieue qui la jouent “aristo”,
Aux rives futiles de nos grandes villes,
Ils en font des quintaux mais la rue c’est l’étau,
Là où gîtaient pile taudis et bidonvilles !

samedi 16 avril 2011

ENTRACTE (Pastel à l'huile, 22x15 cm, 2005)


ENTRACTE

  La salle se vide plus vite qu’elle ne s’est emplie.
  Le rideau est tombé sur les planches de l’estrade après la dernière réplique. Les comédiens retournent, la répartie en allée, en coulisses, peu satisfaits que les premiers actes n’aient pas offert un tableau plus réjouissant malgré la masse des répétitions : le parterre est comble, le public captif mais peu réceptif voire poussif ou intempestif. Il va falloir adapter ici, retrancher là, revoir quelques détails ailleurs,… Bref tout recommencer du sketch éculé ou de la saynète rebattue qu’ils ont servi sur un plateau, improviser, repenser l’intrigue ou le dénouement : la création est permanente !
  Mais pour l’heure, loin des planches et de la fosse d’orchestre, ces Pénélope sans éloge, dans leur loge étriquée et surchauffée, vont bisser entre eux et souffler un peu en testant leur texte, siroter - Allez, c’est ma tournée ! - en vérifiant leurs effets, se questionner en accédant aux accessoires, dialoguer en revoyant leur mise en scène pour les actes à venir. Grâce à des guignols moins studieux, on rit d’un trait ou on plaisante d’une perle, entre crispation et concentration, entre trac et tracts.
  Déjà, la sonnerie retentit. Allez en scène : que le spectacle commence !
  Être prof’ ce n’est pas la vie d’artiste, mais pour qui tient ce rôle, que cet art triste, tout au long de la saison, ressemble à la première d’une comédie sans fausse sortie ni applaudissements ou bien à la dernière d’une tragédie où, même si personne n’en fait un drame, il n’y a de rappel qu’à l’ordre : un art scénique qui ne peut devenir cynique !

jeudi 14 avril 2011

FÊTE FORAINE : SOLEILS GRISANTS (acrylique sur bois, 28x26 cm, 2006)


FÊTE  FORAINE   :   SOLEILS   GRISANTS

Débauche des sens, dans la chaleur de la nuit,
En tourbillons de cris, de lumières et de bruits,
La fête étouffe l’air de sa folle cadence 
Et fait naufrager l’âme dans sa décadence.

mardi 12 avril 2011

VUE DU CIEL (Acrylique sur bois, 83x67 cm, 2010)


VUE  DU  CIEL

Boulevards bavards balisant, sans art ni hasard,
Des vieux quartiers balafrés, lacérés qu’ils fracturent,
Que l’on abreuve d’essence, nourrit de voitures
Voraces rapaces bâfreurs d’espace, busards ;
Des promenades en arcades et colonnades,
Point d’embuscades, de barricades qui cascadent,…
Oui, vue du ciel,
Ma ville sans voix met la vie de ses voies à nu,
S’offre en balades entre aubade et sérénade ;
Depuis ce ciel,
Où sont les sens uniques et les voies sans issue,
Enfilades et bousculades qui cavalcadent ?

Une artère austère, autre cratère de mystères,
Une avenue méconnue fourmillant d’inconnus,
Qui conduit du cours, où l’on court sous des arbres nus,
Jusqu’au square de la gare où s’égare un parterre ;
S’y écrasent des rues courues où tousse un fumeur,
Aux passages voués aux pas sages ou charmeurs,…
Oui, vue du ciel,
Ma ville est asile, prête pour l’aventure,
Toute en froideur, en crasse, en casse et en tumeurs…
Depuis ce ciel,
Qui sait qu’un gitan agité gîte sans toiture,
Que, derrière la clôture, un giton gît, se meurt ?

À l’automne les parcs, les jardins perdent leur ventre,
Courant en allées où vont s’emballer les balais ;
Ces ruelles mal pavées et ce marché dallé,
Lieux hier déliés de la ville, sont des centres
Nouveaux où des carrefours, un rond-point se percutent,
En trottoirs plats où seuls les pieds des passants discutent,…
Oui, vue du ciel,
Ma ville, lierre et pierres, s’est partout étalée,
Manque et banques, elle n’est plus qu’échos qui se répercutent…
Depuis ce ciel, 
Tout n’est plus qu’impasses, accolées comme acculées,
Nul n’envie, nul ne voit qui la Cité persécute !

dimanche 10 avril 2011

JE N'APPLAUDIS PAS À DEMAIN (Acrylique sur bois, 12x20 cm, 2000)


JE   N’APPLAUDIS   PAS   À   DEMAIN

J’ai la vue délavée par la vie
D’avoir suivi mes jours sans envie,
Aux avis du paraître asservie,
D’être toujours servie, assouvie,…

Sur des pavés dorés, je chemine :
La vie, pour moi, n’est qu’une mine
Qui m‘offre ses filons de biftons
Loin des chansons, du qu’en-dira-t-on,…
Oui, je suis blasée quoique gamine
Et l’orgueil des miens me contamine :
Je n’ai ni passions ni compassion,
Pas d’appréhension, peu d’impulsion,…
Seulement cette mauvaise mine
Qu’arborent les miens que l’ennui mine.

Ma vie est parvis, mes vœux préavis,
J’ai tout ce dont rêve qui m’envie
Ou dévie et n’en suis pas ravie :
Las, ma vie lasse n’est que survie !